Mars 2025
Anne V.
La conférencière et le baiser de Klimt revisité.
Bonjour,
Je rentre à mon insu dans une intimité qui me met mal à l’aise pour vous la détailler.
Je ne suis pas particulièrement prude, mais me méfie simplement de l’époque procédurière dans laquelle nous vivons.
Éblouie par la splendeur du tableau, mon regard se fait plus attentif.
Une sensation étrange me submerge et me bouleverse. Et, comme une évidence, ce que je n’avais pas vu m’apparaît :
La tendresse de l’amour d’un fils pour sa mère.
Je perçois vos sourires moqueurs, j’entends vos ricanements liés à la perversité humaine. Je ne suis pas naïve.
Pourtant, il n’y a pas d’inceste. Ce baiser est chaste et pudique.
L’ornement d’or qui revêt les personnages nous prouve la richesse et la pureté de cet échange.
Des rectangles sombres pour l’homme mettent en évidence sa rigueur, sa solidité et son sérieux.
Des motifs circulaires pour la femme laissent deviner sa douceur, sa bonté et sa générosité. Du rouge pour son cœur montre son émotion.
Elle s’est agenouillée pour se blottir contre lui, puis l’enlace de ses bras pour mieux le retenir et figer cet instant. Debout, elle le dominerait encore.
Cette mère est blafarde et mélancolique. Elle sait ce qui l’attend. Son fils va la quitter. Les rôles sont inversés.
Dans une prairie fleurie, presque le paradis, son enfant a grandi.
Il cache son visage et puis retient ses larmes.
Affectueusement, il a recouvert sa maman de son manteau peut-être pour la protéger.
La couleur bronze du mur ne nous laisse pas de marbre.
L’amour est un langage universel et un baiser donné avec sincérité provoque toujours un sentiment gravé dans la mémoire.
Symbole du bonheur éternel.
Edvard Munch, Le cri
Je suis puissant et fort!
Au début, j’étais un peu timide ou plutôt réservé.
Mais tous les jours, il me montrait ses œuvres d’art et j’absorbais comme une éponge l’intensité de ses émotions : sa tristesse, sa joie, sa mélancolie… Je m’extasiais et me manifestais en regard de celles-ci.
Il ouvrait grand la bouche et du plus profond de ses entrailles je surgissais. J’étais de plus en plus guttural devant ses tableaux devenus terrifiants. J’avais pris de l’assurance. On m’entendait de loin, de très loin. J’en étais fier.
Ce jour-là fut différent.
Alors qu’il commençait à se boucher les oreilles.
J’aurais pu lui percer les tympans, tellement il m’avait transformé.
Je fus si violent que son cœur le « lâcha ». Sans doute une crise cardiaque.
La douleur et la peur provoquèrent un état de sidération et lui bloquèrent tous ses muscles m’empêchant d’intervenir.
Malgré tous mes efforts, je fournis un hurlement muet.
Je n’étais pas frustré, mais simplement déçu qu’il me prive ainsi de ma liberté d’expression.
Quand il expira, pour toute consolation, j’ai eu le dernier mot:
Un petit râle si bref et si fugace qu’on ne m’entendît pas.
Je suis devenu silence. Toujours puissant et fort!
Janvier 2025
Madeleine de Proust
Noël, une fête de famille.
J'ai longtemps cru que je n'aimais pas cette journée remplie de « Trop de... ».
Trop de : Préparatifs, agitations, attentes, obligations...
Cette année, nous ne passerons pas Noël en famille et cela me convient.
Installée dans mon fauteuil, j'envoie mes traditionnels textos en grignotant un chocolat.
Je le croque rapidement et soudainement, le goût me projette face au mur blanc de l'infirmerie. J'observe le petit sapin synthétique recouvert de neige carbonique sur lequel nous avions accroché notre père Noël fabriqué avec du coton et de l'éosine. J'entends les sonnettes d'appel résonner comme des petites clochettes et devine un refrain de chants de Noël. Je sens l'odeur d'eau de javel mélangée à celle de notre repas abandonné au four, qu'une fois de plus, nous n'aurons pas le temps de manger.
Je repense à notre complicité, nos fou-rires, l'échange de petits cadeaux, le plaisir d'offrir et celui de recevoir. La même volonté d'accompagner nos malades qui nous unit. Nous avons tellement partagé de Noël ensemble que nous avons l'impression de constituer un peu une famille.
Surprise par ce souvenir ancien, je prends un autre chocolat et le laisse fondre un peu plus longtemps. L'onctuosité et le velouté me déposent devant un beau sapin décoré de guirlandes et de boules dorées et argentées.
Je caresse du regard les petites chaussures déjà recouvertes de cadeaux. J'admire la crèche et ses santons. Je respire les senteurs de pain d'épices et de viennoiseries que j'apporte aux enfants qui dévorent sagement des yeux « La mélodie du bonheur » en réchauffant leurs petites mains autour de leur bol de chocolat. Leurs rires sont si cristallins.
Il n'y a pas de feu dans la cheminée. Le père Noël n'aurait pas pu passer. Il se dégage cependant dans la pièce une véritable chaleur humaine. Un instant de joie et de bonheur. Une belle famille. Bercée par cette atmosphère remplie de douceur et de tendresse, le souvenir grandit et me bouleverse. Le craquant d'un autre chocolat fait pétiller mes papilles et me transporte dans mon enfance. Je suis plongée dans une torpeur incontrôlable et tout devient confus, tout se brouille le sapin me paraît immense. Il est garni d'une multitudes d'objets scintillants.
Tant de flashs surgissent : Des cadeaux de toutes les formes et de toutes les couleurs, des sucres d'orge, des chants, la messe de minuit, la dinde et ses marrons, la bûche et ses petites figurines, le père Noël et son traîneau que l'on n'a jamais réussi à voir malgré toutes nos stratégies ...
Le crépitement du feu dans la cheminée me rappelle à la réalité et je déguste ces instants de vagues réminiscences. Au plus profond de moi tout s'éveille et le souvenir m’apparaît.
La famille s'est agrandie. Noël est devenu un rituel. Nous attendions tous ce jour avec impatience. Quand l'un d'entre nous faisait semblant de ne pas retrouver le cadeau qu'il voulait offrir. C'était le moment d'évoquer la tante Torpille si étourdie que chaque année elle oubliait son carnet de chèques pour nous offrir des cadeaux. Nous n'étions pas dupes et cela nous amusait. Puis nous parlions de nos disparus et racontions quelques anecdotes transformées et embellies avec le temps. Une transmission familiale pour les plus jeunes. Les photos étaient ressorties, nous nous moquions les uns des autres, de nos coiffures, de nos vêtements... Nous arrivions parfois à nous chamailler sans méchanceté et toujours dans la bonne humeur au milieu des éclats de rire. Les enfants étaient émerveillés de découvrir que leurs ancêtres avaient tous été des personnes merveilleuses et extraordinaires. Toute la famille était réunie et il régnait au milieu de nous un bonheur incommensurable.
J'avais oublié que cette journée était remplie de « Tant de... ».
Tant de : Joie, paix, amour, écoute, partage, émotions, respect, bienveillance et générosité.
Janvier 2025
Un simple objet.
Quand je l'ai reçue, je ne l'ai pas aimée. C'était tellement inutile.
Même la couleur ne me plaisait pas.
Pourtant, j'appréciais la personne qui me l'avait offerte.
Je n'ai pas compris et me suis interrogée. Se moquait-elle de moi ?
Que devais-je dire ? Rester sincère ? Remercier poliment tout en sachant que mon regard m'avait sans doute trahie ?
Une bougie. Une petite bougie. Une seule.
Une bougie sans parfum pour masquer les odeurs.
Une bougie sans bougeoir pour décorer un coin caché du salon.
Je restais perplexe. Que pouvais-je en faire ?
Dans la soirée, un orage a éclaté faisant sauter les plombs de la maison.
Apeurée, dans le noir, ce fut le moment opportun de m'en servir.
J'ai senti la fragilité de sa flamme vacillante et gardé l'espoir qu'elle reste allumée assez longtemps pour éclairer les alentours. Elle m'a accompagnée jusqu'au tableau électrique.
Cet objet sans intérêt était devenu essentiel et je l'ai gardé précieusement comme un trésor.
Quand je la regarde, je me souviens de l'odeur de la fumée qui s'en dégageait et dans mes yeux, se reflète l'éclat de cette petite étincelle qui a fait de cette bougie ma lumière.
Nov 2024
Je suis entrée dans la maturité
En poussant la porte de la belle saison.
C’est par le bourgeon que vient le printemps.
À la belle saison, bébé pousse son cri.
La nature se réveille encore emmitouflée sous son manteau moelleux. Un rayon de soleil fait son apparition. La neige fond de plaisir. À l’abri du jardin, le grand arbre fruitier dévoile sans pudeur toute sa nudité et des petits bourgeons s’empressent de le couvrir. L’éclosion de la vie. Le temps se fait léger. Le vent délicatement caressé les nuages pour laisser le passage aux oiseaux migrateurs qui viennent de si loin. Le ciel semble tout doux mais sommeille souvent.
Ah la belle saison ! La fin de l’innocence ?
À la belle saison, le bourgeon a grandi, des feuilles sont sorties encore frêles et fragiles et l’arbre à revêtu sa cape de velours. Pour mieux l’accompagner, le gazon s’est paré d’un dégradé de verts. La nuit laisse place au jour. Le ciel s’est réchauffé protégeant l’hirondelle qui cherche son chemin et laisse présager plein de petits bonheurs qui volent à tire-d’aile. Au bout de la clairière, les vaches et leurs petits se régalent de pousses vertes offrant à leurs papilles un éclat de fraîcheur. Le foin sec de l’hiver s’agite dans tous les sens. Les rats ou les souris, les lapins et le renard qui quitte sa tanière s’en donnent à cœur joie. Les oiseaux chantent à tue-tête. Les écureuils s’amusent. La vie est en mouvement. Il fait parfois frisquet et au fond de son nid, le petit oisillon retarde son premier vol, apeuré par ce bruit.
Ah la belle saison ! La fin de l’insouciance ?
À la belle saison, la nature se révolte et se croit si puissante. Les torrents sont en crue, les terrains gorgés d’eau. Les fleurs s’épanouissent sans un ordre précis. On frôle l’anarchie. Le temps est à l’orage. Des giboulées de larmes. Alors le tonnerre gronde tel une tronçonneuse qui déchire l’arc en ciel éparpillant autour une gerbe d’étincelles de toutes les couleurs, badigeonnant le sol d’un tapis bariolé. Un vrai feu d’artifice. L’explosion de la vie.
Ah la belle saison ! La fin de l’insolence ?
À la belle saison, le temps s’est apaisé. Le ciel s’est coiffé d’un foulard de coton. On rêve de ballades. Une envie de flâner nous sort du quotidien. Rien de plus merveilleux qu’un pique-nique champêtre. On dépose la nappe au dessus des tulipes prêtes à nous accueillir. Un parfum de saveurs. Un festin pour les sens, au milieu des abeilles en quête de nectar. Sous la lumière dorée d’un coucher de soleil, on pense aux lendemains, des projets pleins la tête, instants de confidences. Tous les petits jardins n’ont plus aucun secret. Et puis on se découvre. Oui mais pas trop quand même pour suivre le dicton. L’atmosphère est festive, vivante et conviviale. Une fois la nuit tombée, les fleurs se sont fermées. Le calme s’est installé, la vie reprend son cours.
Ah la belle saison ! Début de la raison ?
À la belle saison, c’est le temps des promesses, des bonnes résolutions. Prendre un nouveau départ et faire un grand ménage. Le ménage de printemps. Le temps est aux amours. Les couples sont formés. Le cerisier en fleurs s’est recouvert d’un voile. Ses demoiselles d’honneur, les roses du verger embaument de senteurs et brillent de mille feux. Un défilé de mode. Le vent est à la fête, les pétales s’envolent comme des papillons. Le tulle s’en est allé, le fruit est apparu croqué à pleines dents. Les oiseaux font leurs nids et couvent leurs petits. La nature s’équilibre et la vie s’organise. Le froid est derrière nous et la chaleur s’installe. La terre devient fertile et près du potager, au creux de sa maison, bébé pousse son cri.
Ah la belle saison ! Saison de l’espérance.
25 septembre 2023
Le mystère de la page blanche
Me voilà, une fois de plus, devant cette maudite page.
Des idées ? J’en ai ! Peut-être même un peu trop.
Mais comment les transcrire sur ce papier blanc qui sera bientôt entièrement gribouillé.
Écrire cela ? Ne pas l’écrire ?
Je me questionne, je m’interroge, je bloque en pensant à la façon dont ce sera interprété.
Peur de blesser? D’être jugée? Ou de ne pas intéresser…
Je me force et me lance ce défi de: « Même pas cap ! »
Je vous regarde en train d’écrire :
Certains ont les yeux levés… Comme si l’inspiration venait d’en haut !
D’autres se tiennent la tête et semblent hésiter…
Je sais que chacun de vous aboutira à un texte qui m’enchantera.
J’avance doucement.
J’aimerais partager avec vous.
Je m’élance.
Mon stylo s’affole. « Stop. Tu vas trop vite. Je n’arrive plus à te suivre. »
La page se remplit.
Le vide se comble et l’inconnu devient connu.
Le brouillard se dissipe et ma retenue s’envole.
Le plaisir est là, qui ressemble presque à une addiction.
Je manque de vocabulaire, je rature, je réécris différemment, je me répète, je me disperse…
Comme dans un jeu de cache-cache, je cherche les mots et j’en trouve quelques-uns enfouis au plus profond de ma mémoire.
Je me surprends.
Ça ne s’arrête pas. Je pourrais écrire infiniment…
Et d’une page blanche qui m’effrayait, je suis face à une page noircie, et une sensation de plénitude m’envahit.
J’apprends et je découvre.
janvier 2024
La paresse
Cours, cours…
« Vas-y, mais vas-y donc!
Il faut, tu dois… »
Encore un peu, un peu de temps.
Je me lève.
Je marche, aussi rapide qu’un escargot.
Je me déplace, aussi lente qu’une limace.
Je procrastine, je retarde, je recule.
Je cherche une excuse, j’invente.
Trop de mouvements !
Mon corps s’active. Mon esprit s’active.
« Vas-y, mais vas-y donc!
Il faut, tu dois… »
Encore un peu, un peu de temps.
Je bouge et tu attends.
Je tourbillonne, je danse, je virevolte.
Telle une feuille d’automne au gré du vent:
À gauche, à droite.
Je brasse de l’air, je tourne en rond.
Je perds du temps, pour en gagner.
Mon corps s’active. Mon esprit se repose.
« Vas-y, mais vas-y donc! »
Je sais: « Il faut, je dois… »
Mais je n’ai pas envie.
Alors je m’évade, je m’attarde.
Je vole, je vole et puis m’envole.
Légère comme un papillon.
Je survole le temps et l’espace.
Mon cerveau s’égare, ma pensée vagabonde.
Mon corps se repose. Mon esprit s’active.
« Vas-y, mais vas-y donc! »
Je n’irai plus, je suis inerte, je ne bouge plus.
Tu n’attends plus.
Enfin le calme, enfin le repos.
Du temps pour moi, rien que pour moi.
« Il ne faut plus, je ne dois plus… »
Mon corps se repose. Mon esprit se repose.
J’ai tout le temps. L’éternité.
décembre 2023
« Les avocats sont-ils meilleurs mûrs ?
Pauvre petit avocat, trop pâle, à côté de ses frères sur sa branche généalogique.
Tous avocats, de père en fils.
Il était vert de peur à l’idée d’être mangé tout cru.
Il grandit, mûrit et se retrouva au milieu d’une grande boîte d’avocats.
Il en vit des vertes et des pas mûres.
Un jour, il fut appelé sur une affaire un peu juteuse, de guacamole… évidemment !
et un peu vert au travail, il accepta.
Comme il ne se pressait pas, l’affaire lui fut retirée au profit de son frère.
D’abord vert de jalousie, puis vert de rage,
il demanda le feu vert pour aller se mettre au vert.
Parti au diable vauvert, il découvrit avec stupeur qu’il avait la main verte,
et donnant naissance à deux petits avocats, il leur enseigna le métier.
Il attendit qu’on le rappelle et prit de la bouteille.
Puis il mûrit, mûrit à en devenir kaki.
Contrairement à certains de ses congénères,
il n’était pas pourri et malgré tout, encore un peu vert pour son âge.
Les avocats sont-ils meilleurs mûrs ?
La maturité s’acquiert au fil du temps.
Même s’il y en a pour tous les goûts, pour ma part, je les préfère à point.
2023-2024 Nouvelle
Violences en Ehpad
Dans le hall d'accueil, l'assistante de direction accoste Marie sans prendre le temps de luidire bonjour, lui demandant d'aller voir un nouveau résident qui semble être tombé. Elle le voit assis par terre, perdu, comme on peut l'être quand on se croit abandonné et que lapeur nous envahit. Son regard hagard passe de Marie à la porte. Elle se présente et
essaye de le rassurer. Il tourne la tête, ne répond pas à son sourire, s’énerve un peu, ne comprend pas pourquoi il est ici. Personne ne lui a expliqué ce qu'il fait dans un ehpad. Il veut appeler sa fille et se souvient.
Il se souvient du cambriolage en pleine nuit chez lui.
Il se souvient de sa fille, qui l'a découvert au petit matin, et l'a envoyé immédiatement à l’hôpital. Comme si elle souhaitait se débarrasser de lui.
Il se souvient de son hospitalisation et du refus des médecins de le renvoyer seul à son domicile.
À 99 ans, il vivait parfaitement bien chez lui et participait encore à des activités à l'extérieur.
Actif et autonome, il n'avait jamais, vraiment jamais, envisagé de finir ses jours en ehpad.
Plutôt mourir, pensait-il.
Il regrette que les cambrioleurs ne l'aient pas assassiné.
« Ça serait fini ! »
Anne a rejoint Marie. Ensemble, elles le relèvent et essayent de l'installer dans son fauteuil. Il est opposant et dit : « Laissez-moi crever ! »
Elles évitent les coups, ne s'énervent pas. Elles ont l'habitude et ne lui en veulent pas carelle savent que cette agressivité n'est pas contre elles. C'est probablement le seul moyen qu'il a trouvé en ce moment pour communiquer. Il décharge à sa façon ce trop plein d'émotions accumulées ces derniers jours.
Il regarde ses poings meurtris et se souvient de ses actes. Il a honte. Il n'avait jamais été brutal.
Il demande s'il peut prendre l'air sur le balcon, prétextant un besoin de fumer. Les résidents sont autorisés mais une collègue avait fermé sa porte à clé pour le protéger et en même temps se rassurer.
Si elles ouvrent cette porte, ne va-t-il pas enjamber le balcon et sauter ?
Si elles refusent, ne va-t-il pas s'énerver à nouveau et tout casser ?
Que faire ?
Marie ressent le goût amer d'une décision à prendre. Elle s’apprête à lui expliquer que : ...
Quand Anne lui chuchote :
« Vas-y ! Ouvre la porte. N’aie pas peur ! Tu sais bien qu’il peut sortir à l’extérieur s’il en a envie. Ne lui retire pas cette liberté. »
Marie se fait violence et sort sa clé en lui disant qu'elle sait qu’il ne fume pas, mais que nous aurions tort de nous priver de la chaleur du soleil. Anne reste à ses côtés. Il s’approche du bord, et déclare : « C’est beau la confiance ! »
Il se détend et continue à parler. Elles découvrent une personne drôle et excentrique.
Toutes les deux comprennent qu'un cadre institutionnel trop rigide aurait pu les empêcher de créer ce lien. La relation humaine dans toute sa complexité est le cœur de leur métier.
Anne et Marie se sont rencontrées depuis leur plus tendre enfance et ne se sont plus jamais quittées. Elles ont tout partagé, ont fait leurs études d'infirmières dans la même école et comme une évidence, travaillent dans le même ehpad. Depuis tout ce temps passé ensemble, elles ont pris l'habitude de finir la phrase de l'autre ou de parler à sa place. Ce n'est pas par manque de respect. Bien au contraire, c'est simplement parce qu'elles se connaissent si bien et que comme personne ne s'en est jamais plaint, cette attitude est devenue pour elles complètement inconsciente.
De retour à l'infirmerie, la directrice interpelle sèchement Anne, lui ordonnant de monter voir immédiatement une résidente, suite à l'appel de sa fille mécontente de la prise en charge de sa maman.
Marie et Anne frappent à la porte de sa chambre qui s'ouvre brutalement et sont violemment accueillies.
La fille fait part de son inquiétude pour sa maman qui ne peut plus parler.
Anne regarde la résidente :Elle a une tête de fouine et des yeux rieurs. Sous son aspect fragile, se cache un sacré
caractère.
Sa fille lui ressemble trait pour trait : même physique, même état d'esprit.
Toujours « aux petits soins » pour sa maman.
Marie souffle à Anne : « Ne te fais pas avoir, elle simule, regarde ses yeux pétillants. »
Marie est intuitive, douce, sensible, trop sensible, sage, réfléchie, parfois un peu craintive.
Anne l'écoute.
Elle s'occupe de sa malade, prend ses constantes, vérifie ses réflexes, observe son état général. La résidente se mobilise correctement et répond par des signes.
Excepté l'aphasie, tout semble être normal.
S'adressant aussi bien à madame qu'à sa fille, elle leur dit :
« Je vais surveiller l'évolution, et je préviendrai son médecin. »
« Ah non ! Il faut l'appeler tout de suite ! » Hurle sa fille.
« Vous voyez bien que maman est malade, c'est grave ! Je veux que le docteur vienne
immédiatement ! Vous êtes vraiment incompétente ! »
En sortant, Marie et Anne croisent l'aide-soignante.
Celle-ci leur confirme n'avoir eu aucun problème ce matin et précise que sa fille est arrivée en retard, ce qui a pu contrarier la résidente. Elle connaît un moyen pour savoir si elle simule vraiment.
Aux regards noirs et mauvais qu'elles reçoivent en rentrant dans la chambre, elles comprennent rapidement qu'elles ont été entendues.
Les insultes verbales fusent. Une déferlante d'injures : « Bonnes à rien, idiotes, QI d’huîtres, nulles, maltraitantes, méchantes ...
Maman, n'est pas comme ça ! Je vous dis qu'elle est malade ! Je la connais quand même mieux que vous ! »
Anne est cérébrale, spontanée, téméraire, parfois un peu trop vive. Elle va répliquer mais Marie la retient doucement en lui soufflant :
« Calme-toi, tu sais bien que ça ne sert à rien de te justifier. »
Ces deux caractères opposés les ont rapprochées.
Anne pense que c'est elle qui domine mais Marie sait que ce n'est pas le cas. Celle-ci a une telle façon d'amener les choses toujours en finesse et avec délicatesse qu' Anne ne se rend pas compte qu'elle est manipulée.
L'aide soignante s'approche de son lit et lui caresse les bras de ses mains froides.
La résidente grimace, mais stoïque ne dit rien. Pas un son ne s'échappe.
Marie s'inquiète, d'habitude cela la fait crier.
C'est l'heure du déjeuner. L'agent hospitalier apporte un plateau, le dépose sur sa table et repart en lui souhaitant bon appétit. Pas un mot. C'est surprenant.
Marie s'est peut-être trompée, Anne commence à douter.
Elle déplace l'assiette un peu plus loin, craignant un risque de fausse route et c'est en poussant le verre de vin qu'elles entendent :
« Ah non pas le vin ! »
Suivi de « Oh zut ! »
Surprises, elles se retournent et Anne remarque le grand sourire coquin, signifiant : Je vous ai bien eue !
Sa fille rassurée et ne remettant nullement en cause l'attitude de sa maman, lui dit :
« Ah ! maman, ça va mieux. Tu reparles. Tu sais que tu m'as fait peur. »
Marie et Anne ne recevront aucune excuse. Cette violence verbale, elles la subissent si souvent.
Au bout du couloir, elles entendent des éclats de voix.
Une altercation entre deux résidents qui ne se supportent plus.
L'un est arrivé en retard et a dû prendre son repas dans sa chambre. Visiblement il s'apprête à redescendre son plateau rempli de vaisselle vide.
L'autre a fini de dîner en salle à manger et remonte seul avec sa canne.
Ils se sont croisés devant l'ascenseur. L'un empêchant l'autre de passer.
Parfois, il suffit de peu de chose pour qu'une dispute éclate : un regard, une parole, unsourire... Mal interprétés.
Marie et Anne se précipitent pour essayer de les séparer. En vain.
Un coup de canne, un verre brisé...
L'un des deux s'appuie contre la porte dans le but d'acquérir plus de solidité sur ses pieds.
Soudain, celle-ci s'ouvre. Le résident se retrouve allongé par terre dans l'ascenseur sous les yeux effarés d'une pensionnaire qui remontait tranquillement.
Fin de l’altercation. Chacun est retourné dans sa chambre.
Par chance, cette fois-ci, il n'y a pas eu de blessés et Marie et Anne une fois de plus se tairont, coupables de n'avoir pas réussi à gérer cette situation avant que celle-ci nedégénère.
On leur a trop souvent reproché d'être responsable de cette violence et de n'avoir pas su anticiper.
Elles savent que dans les ehpad, l'agressivité est omniprésente entre résidents, personnel soignant, familles et même supérieurs hiérarchiques. Celle-ci est largement sous-estimée puisque ce phénomène reste tabou. Personne n'en parle mais ces violences envers le personnel soignant sont pourtant quotidiennes.
Les résidents ne sont pas devenus plus belliqueux mais leur prise en charge a été modifiée.
La contention et les médicaments pour les calmer ne sont plus utilisés de manière systématique.
Les personnes âgées vivent plus longtemps et présentent de plus en plus de troubles psycho-comportementaux qui sont traités d'une manière plus humaine.
Les soignants sont plus proches des résidents et sont donc plus exposés.
En recherchant leur consentement, ils reçoivent davantage de coups, d'injures, de crachats et se retrouvent parfois avec des dents ou des ongles plantées dans la chair.
Leregard de la société a évolué. Les infirmières ne sont pas devenues plus maltraitantesmais leur seuil de tolérance a diminué et ce qui autrefois était caché et acceptable, ledevient de moins en moins.
Les insultes et les gestes déplacés ont toujours existé mais étaient, minimisés, banalisés,
voire normalisés.
Anne et Marie se préparent à effectuer les pansements de la matinée. Elles sortent le classeur des pansements. Il est vide.
À la recherche de leurs feuilles et ne les trouvant nulle part, désespérées, ellessoupçonnent leur cadre infirmier de les avoir enlevées.
Marie dit à Anne :
« Ne cherche pas. C'est lui qui les a prises. Quel lâche ! Il aurait pu nous en parler. »
Elles savaient qu'un jour il n'y aurait plus de classeur suite à leur nouvelle organisation :
« Papier zéro » consécutive à la plainte d'un stagiaire trouvant qu'il y avait trop de papiers administratifs inutiles, mais jusque-là, elles avaient réussi à le garder. Il leur permettait d'avoir un meilleur suivi sur la progression des pansements, le logiciel informatique n'étant pas suffisamment précis.
Même si elles se doutaient que cela arriverait, elles sont choquées par cette façon de procéder et Anne très énervée part à contre cœur faire le pansement d'une résidente suivie par Marie qui se met légèrement en retrait.
La blessée est agréable, discrète et solitaire.
De mauvaise humeur, Anne reste distante mais cependant polie. Accroupie face à elle, sans la regarder, elle se concentre sur le pansement en pensant au geste à effectuer et à rien d’autre, tout en répondant distraitement à ses questions sans vraiment l’écouter.
« Ça va, merci...oui...non... »
Pendant toute la durée du soin, la résidente qui d'ordinaire n'est pas bavarde l'interroge.
Anne a du mal à contenir son agacement. Elle n'a pas envie de discuter.
Discrètement, Marie lui dit :
« Sois plus aimable. Elle n'est pas responsable de ta mauvaise humeur. »
En se relevant, elle croise son regard. Celui-ci est doux et met en confiance.
La résidente lui sourit et continue de parler.
Pendant qu'elle range son matériel elle l’écoute attentivement et se rend compte qu'elle a failli passer à côté de l'essentiel de son métier.
Anne n'est pas fière de son comportement.
Elle n'a pas envie de se battre contre cette maltraitance psychologique à son égard. Le « vol » des feuilles de pansements l'empêchant d'effectuer son travail correctement l'affecte. Elle veut démissionner et en fait part à Marie qui refuse de quitter les résidents.
Pour la première fois, Anne se retrouve seule dans le bureau de la directrice pour lui expliquer son mal-être.
La directrice refuse de l'écouter et lui parle du TO (Taux d'occupation), des GIR (Évaluation du degré de dépendance) du Pathos (Outil élaboré pour évaluer les niveaux de soins nécessaires), de coupe budgétaire, de la pression du groupe qu'elle subit, de sa difficulté à recruter du personnel.
« Encore faudrait-il qu'elle le garde ! »
« Attention Anne, vous risquez de faire preuve d'insubordination. »
Anne est surprise. Elle ne s'est pas rendue compte qu'elle a exprimé verbalement sa pensée. Cet étonnement est mal interprété par la directrice qui ajoute :
« Et si vous ne savez pas ce que ça signifie, vous regarderez dans le dictionnaire ! » Anne ressent du dégoût envers cette personne qui la méprise et l'humilie. Elle n'a plus envie de se justifier. Pourtant, elle a essayé quand son cadre infirmier l'a accusé :
D'être trop empathique.
De mal pratiquer les gestes barrières auprès des résidents.
Ces personnes âgées et vulnérables en mal d'affection qui l'embrassaient, la caressaient, elle aurait dû les repousser parce qu'elles n'étaient pas violentes, alors qu'elle n'était pasen mesure de le faire avec celles qui la griffaient, la mordaient, la pinçaient ou lui crachaient dessus. Elle ne savait pas toucher sans être touchée et souhaitait simplement
rester humaine, la fibre de son métier.
Alors que l'établissement n'avait pas les moyens de les protéger par manque de matériel,elle trouvait ces reproches injustes. Elle aurait dû partir quand elle avait demandé pourquoi elles n'étaient payées que dix heures pour douze heures de présence et qu'on lui avait répondu qu'elle était la seule à se plaindre. La direction ayant profité de l'arrivée de la covid pour modifier leur planning et leurs horaires sans leur consentement à titre provisoire séparant Marie et Anne de leurs collègues qui travaillaient en alternance avec elles. Le provisoire est devenu définitif et celles-ci ont démissionner. Ce fut tellement traumatisant qu'elle était prête à les suivre. Marie l'avait retenue et elle avait accepté de rester.
Sa décision est prise et irrévocable. Pour laisser Marie travailler plus paisiblement, elle doit quitter cette atmosphère malsaine et toxique.
Anne s'en va laissant Marie toute seule.
Marie ne sera jamais violente. Elle garde en mémoire le jour où cela a failli arriver alors qu'elle était stagiaire et s'occupait d'un patient agressif.
La douche s'était bien passée, elle avait pratiquement fini de l'habiller et était en train de lui mettre sa deuxième chaussure quand elle reçut brusquement un coup sur la tête. Sa propre main s'est levée par réflexe et a brassé l'air. La douleur et les points de suture ont vite été oubliés, mais la frayeur ressentie par son geste est ancrée à tout jamais.
Que se serait-il passé si elle avait atteint sa cible ?
Elle avait voulu arrêter ses études, mais Anne l'avait convaincue de continuer.
L'infirmière du service lui avait dit : « Il ne s'est rien passé. Tu n'es que stagiaire, tu apprendras comment gérer un patient agressif. »
Maintenant, elle sait comment faire, mais elle vient travailler à reculons, la boule au ventre.
Elle accepte tout, est devenue soumise puisqu'elle ne sait pas dire non. Anne lui manque. Sa force de caractère, ses interventions. C'était toujours elle qui réagissait en premier, celle qui défendait « la veuve et l'orphelin » au risque de prendre des coups. Celle qui n'avait pas « sa langue dans sa poche » et qui avec pertinence, face à une injustice savait la dénoncer, même si ce n'était pas toujours fait avec diplomatie et rendait parfois Marie mal à l'aise. Elle réalise à quel point elles se complètent parfaitement et qu'aucune ne domine l'autre. Pire encore, sans Anne, Marie n'existe plus. Même si elle garde en elle cette profonde gentillesse, son hypersensibilité la rattrape et seule Anne réussit à la canaliser.
C'est la première fois qu'elles sont séparées l'une de l'autre. Adolescentes, elles n'étaientpas toujours d'accord, mais ça n'avait jamais été aussi loin.
Marie s'accroche et courageusement part s'occuper d'une résidente qui nécessite une prise en charge particulièrement difficile.
Dès son entrée dans la chambre, elle capte une odeur fétide. D’un simple coup d’œil, elle évalue son état général, repère la couleur de sa peau et de ses extrémités, regarde si elles sont cyanosées, entend sa respiration régulière. Si ses petits yeux grands ouverts n'étaient pas si expressifs, on pourrait penser qu'elle a déjà rejoint les étoiles.
Cette résidente n'a plus que la peau et les os et lui inspire une certaine aversion. Le soin implique un travail émotionnel bien souvent ignoré puisqu'il n'est pas pris en compte dans la charge de travail et l'ajuster en permanence demande une bonne partie d'énergie et Marie est épuisée.
Méfiante, elle avance tout doucement.
« Va-t’en salope ! » Éructe une voix en lui envoyant un crachat. « J'ai soif ! »
Marie s'approche et lui donne à boire, prête à éviter le verre. À la place, c'est un deuxième crachat.
Calmement, elle lui explique qu'elle vient faire sa toilette.
La résidente refuse et agrippe le bras de Marie en la pinçant violemment. Face à un refus de soin, Marie sait qu'elle doit passer la main, mais à qui ?
Il serait donc préférable de reporter le soin, mais n'est-ce pas maltraitant ?
Marie n'a plus de collègue et ne peut prendre un avis qu'auprès de son cadre infirmier qui
lui répond en riant : « Je ne sais pas, mais personne ne se plaindra, elle n'a pas de famille. »
Marie terriblement blessée appelle Anne à son secours. Il n'y a qu'elle qui pourra l'aider à démissionner. Toute seule, elle n'en est pas capable et cela fait trop longtemps que sa lettre est dans son sac.
Marie se trouve dans le bureau de la direction et n'arrive pas à s'exprimer.
Sa décision est prise, mais elle n'ose pas parler par peur de représailles et elle comprendmieux les familles qui refusent de se plaindre.
La directrice la regarde méchamment et s'impatiente en disant :
« Vous me faites perdre mon temps. »
Anne surgit vivement et dit simplement : « C'est fini ! »
Marie dépose sa lettre datée sur le bureau et sous l’œil interloqué de leur directrice, elles sortent ensemble sans échanger un mot, heureuses de s'être retrouvées et soulagées de partir.
La période de préavis se fera en arrêt maladie.
Alors qu'elles sont en train de lire le journal, une petite annonce les interpelle :
« Recherche infirmières en psychiatrie ».
Elles savent immédiatement qu'elles vont postuler.
Faiblement, Marie dit à Anne :
« Tu te souviens, on avait dit jamais la psychiatrie. »
Anne lui répond :
« Nous risquons d'être confrontées à nouveau à la violence. »
En rajoutant :
« Le comportement parfois incongru et inquiétant de certains patients ne nous a jamais déconcertées.
Crier parce qu'on a peur, déambuler parce qu'on s'ennuie, être agressif parce qu'on se sent menacé ou refuser les soins parce qu'on ne les comprend pas ne sont pas pour nous des troubles du comportement problématiques. Tout au plus, ils sont dérangeants, théâtraux, exagérés... Mais ne sont ni intentionnels ni personnels.
Nous savons utiliser nos neurones miroir impliqués dans nos fonctions motrices.
Le sourire qui entraîne le sourire, le calme qui incite au calme, la détermination de l'un qui provoque celle de l'autre. Nous avons appris à à chambouler nos sens quand cela est nécessaire : Écouter avec le regard et entendre grâce à la position du corps qui se trouve face à nous. Il nous est facile d'établir une relation émotionnelle par la parole, le regard et le toucher tout en gardant une attitude empathique et respectueuse.
La violence des malades nous la connaissons bien, elle fait partie intégrante de notre profession. Par contre la maltraitance institutionnelle engendrée par nos supérieurs hiérarchiques est incompréhensible. Nous nous sommes senti agresser personnellement et cela nous a séparées. »
« Espérons que ce ne soit pas devenu partout pareil. »
« Rien ne nous divisera plus jamais et nous nous présenterons ensemble.
Toutes les deux ou aucune d'entre nous et plus jamais l'une sans l'autre. »
Le jour de l'entretien arrive.
La surveillante se présente et commence à poser quelques questions : « Bonjour Marianne, pouvez-vous me parler de votre expérience professionnelle ? »
Marie et Anne sont concentrées, elles désirent vraiment ce poste.
Laquelle des deux va s'exprimer ? Marie la sensible ou Anne la cérébrale ?
Toutes les deux répondent d'une seule voix. C'est leur union qui fait leur force.
Marianne apprendra plus tard que suite à son départ, les membres de la direction ont été renvoyés pour incompétence.
De nombreux résidents ont quitté l'établissement.
L’ehpad a été racheté par un autre groupe.
Marianne n'a pas d'esprit de vengeance, elle s'épanouit sur son nouveau lieu de travail et espère sincèrement que les nouveaux résidents et personnels de l'ehpad seront bien traités.
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